ASSEZ DE GÂCHIS !
LETTRE OUVERTE À MES CONTEMPORAINS
À
quand remonte la Crise avec un grand C ? À 2008 avec le "crash"? À
2006 avec les "subprimes"? À la guerre de 40? À celle de 100 ans? À
la chute de l'empire Romain? À Caïn et Abel…
Il
n'existe pas d'autre enfer que celui que nous créons individuellement et
collectivement. La Terre n'offre-t-elle pas toutes les conditions pour que
chaque individu, chaque espèce y prospère harmonieusement? Seule la nôtre, avec
son cerveau tellement sophistiqué, a réussi ce tour de force d'en faire un lieu
de discorde et de dysharmonie plus souvent en crise qu'en bonne santé. Mais il
n'est pas trop tard. Il est encore temps de revenir à nous. J'emploie à dessin
ce terme de 'revenir à soi', comme cela arrive après une perte de conscience
car c'est bien de cela qu'il s'agit, nous avons perdu conscience. Mais
l'avons-nous jamais eue, sauf par éclairs…
Ne
faut-il pas avoir perdu l'esprit pour avoir, en moins de deux siècles, exténué
la Terre et les océans dont nous tirons notre survie? Pour avoir livré des
guerres d'extermination à des natifs d'autres continents, des humains comme
nous, que nous avons dépouillés pour nous emparer de leurs terres, des
richesses de leur sous-sol? Pour les avoir déracinés, amputés de leur culture
en leur imposant nos croyances et une modernité qui ne leur laissent que
les yeux pour pleurer? Ne parlons pas du Moyen Âge ni du temps de Christophe
Colomb, cela se passe encore aujourd'hui sous nos yeux pour les Tibétains ou
les Ouïgours. Ne faut-il pas avoir perdu l'esprit pour avoir pollué les
éléments dont nous sommes nous-mêmes composés et dont notre existence dépend et
pour persévérer dans cette voie sans autre issue que la destruction et la mort?
Assez! Assez de gâchis!
QUE
VOULONS-NOUS EN SOMME?
Nous
voulons tous vivre, respirer un air sain, boire une eau pure, manger à notre
faim des aliments qui ne fassent pas de nous des "mutants
transgéniques", travailler de nos mains, de notre intelligence, de
nos dons artistiques à faire de notre bref passage sur Terre autre chose qu'un
désastre. Nous ne voulons pas quitter ce monde en sachant que nos enfants
hériteront de notre politique de la Terre brûlée, de rivières, de fleuves,
d'océans dévastés, d'un climat dégradé. Nous ne voulons pas de ce film
d'épouvante que l'esprit corrompu par l'aveuglement et la cupidité est entrain
de produire.
NOUS
NE NOUS RÉSIGNERONS PAS!
Nous
sommes de plus en plus nombreux à refuser de cautionner cette forme d'esprit pathologique
et la misère qu'elle engendre pour les populations de tous les continents; à dire
non à l'anéantissement des dernières colonies d'aborigènes, des espèces
animales et des forêts en voie de disparition, au profit d'un petit lot
d'exploitants qui s'enrichissent aux dépends de multitudes réduites au désespoir. Des complicités politiques, des passe-droits crapuleux,
des lois leur ont donné licence de se comporter avec un tel cynisme.
Changeons-les. Ensemble, nous pouvons le faire.
NOUS
NE POSSÉDONS PAS D'AUTRE MONDE QUE CE MONDE.
Et
nous n'avons plus le temps de tergiverser. Plus nombreux nous serons de par le
monde à réagir, à suggérer des idées, à nous associer, à constituer des
réseaux, à protester, à boycotter, à ridiculiser, à faire pression par tous
moyens non violents sur les pouvoirs en place, plus tôt nous redresserons
la barre de cette galère en perdition qu'est la société actuelle. Il existe des
associations innombrables qui agissent déjà et font un travail remarquable,
beaucoup parmi nous sont venus grossir leurs rangs; il a toujours existé des
êtres de moralité impeccable, des justes qui ont le sens de la droiture, de
l'équité, du respect de soi, de l'amour d'autrui, de la compassion pour les
déshérités. Soyons de ceux-là! Et puisque la mondialisation s'impose, d'un bout
à l'autre de la Terre parlons d'une même voix:
DÉCLARONS LA PAIX, La LIBERTÉ, L'ÉGALITÉ, LA FRATERNITÉ.
DÉCLARONS LA PAIX, La LIBERTÉ, L'ÉGALITÉ, LA FRATERNITÉ.
Cette
devise et ses mots ne nous font ni peur ni rire. Ne parlez pas de compassion,
de fraternité à ceux qui gravitent autour du pouvoir et se font des
croche-pieds dans leur paniers de crabes, nous savons bien pourquoi ils
les ridiculisent.
AGISSONS
SANS DÉLAI.
Avec
l'ère du foisonnement industriel et technologique du grand capital, favorisé
par la rapidité des communications et la circulation des informations en temps
réel, un libéralisme outrancier s'est développé: la jungle des affaires avec sa
loi sans pitié, la compétition sauvage, la cupidité, l'escalade boursière et
les paradis fiscaux; en politique, le non respect des promesses électorales, la
triche, le mépris et l'abus des classes défavorisées. Dans la foulée, les
sociétés du crime organisé en ont profité pour proliférer, infiltrer la société
civile, les institutions et diffuser leur esprit mafieux. Inconscients de leur
responsabilité, des producteurs de films et de séries exaltent les exploits des
"parrains" suscitant l'admiration des jeunes de banlieues et
d'ailleurs, avec les risques de dérives que cela comporte.
Sur
ce terreau, une forme de dysfonctionnement mental a gagné la plupart des
couches sociales parasitant et contaminant la conscience collective. Ni les
individus, ni le monde de la politique, ni les divers ordres religieux, ni même
les associations humanitaires, n'ont été épargnés par la contagion.
Il
n'existe pas de vaccin, pas de pilule magique pour assainir la psyché du
monde. On peut soigner le corps avec des molécules, mais pour décontaminer
l'esprit qui régit le corps elles sont impuissantes.
SEUL
L'ESPRIT PEUT DÉFAIRE CE QUE L'ESPRIT A CONÇU.
Ce
dont nous avons un besoin pressant, c'est d'une prophylaxie mentale, une écologie
de l'esprit indissociable de celle de l'environnement et de l'écologie
politique. J'entends par là, une hygiène de l'esprit au même titre
que celle du corps. N'avons-nous pas appris à nous brosser les dents? À nous
laver les mains? Quel soin prenons-nous de ce avec quoi nous gérons notre vie,
notre sensibilité, nos rapports familiaux et sociaux? Qu'en est-il de nos
comportements? De nos engagements? Sur quels critères les choisissons-nous?
L'écologie
de l'esprit s'apprend, comme le reste, et nous avons tout à découvrir dans ce
domaine, mais soyons sûrs que si elle était enseignée dés le plus jeûne âge
dans les écoles publiques, nous aurions tous à y gagner, les jeunes, les
séniors et toute la société. Cependant, tant que ce n'est pas le cas, c'est à
nous qu'il revient de l'enseigner à nos enfants. Mais auparavant nous avons
besoin de développer et de parfaire notre propre éducation dans ce domaine.
Donnons-nous les moyens d'intégrer de nouvelles connaissances.
LE
MONDE CHANGE CHANGEONS AVEC LUI
À
nous de reconquérir notre autonomie de pensée confisquée par la publicité et
par la délégation de nos responsabilités citoyennes à des
prétendus "spécialistes" inféodés au pouvoir en place; à nous de conquérir
notre terrain d'études pour nous adapter à ce nouveau monde du XXIe siècle.
Créons dés aujourd'hui des Universités Populaires Écologiques,
itinérantes ou fixes. Requérons de nos philosophes, de nos scientifiques, des
juristes et des économistes, des poètes et des musiciens qu'ils nous apportent
leurs lumières et nous aident à changer nos vieux schémas de pensée. Nos
maîtres pourraient s'appeler Edgar Morin, Annick de Souzenelle, Hubert Reeve,
Élizabeth Badinter, Robert Badinter, Gisèle Halimi, Pierre Rabbi, Olivier
Messiaen, Christina Pluhar, et pourquoi pas, d'autres instructeurs venus de
pays et de cultures différentes, potentielles sources d'inspiration dont les
noms nous sont plus ou moins familiers, Je pense entre autres à Vandana
Shiva.
Peut-être
leur transmission pourrait-elle se faire sous forme de conférences publiques,
retransmises par exemple sur une "Radio Écologie de l'Esprit", (de
l'Humain, ou tout autre meilleur nom à trouver). Nous pourrions voir l'orateur
et son auditoire en streaming sur un site internet créé à cet usage — c'est peu
coûteux — en direct puis en différé afin que tout le monde puisse y avoir accès
à l'heure qui lui convient. Il s'agirait:
—
D'une éducation laïque, universelle s'adressant à tous et
particulièrement aux parents désemparés par rapport à l'éducation de
leurs enfants, et à ceux d'entre nous qui souhaitent s'investir dans des postes
de responsabilités politiques.
—
D'une mise en question des idées reçues que nous trainons comme de
vieilles casseroles rouillées qui lestent notre intelligence, l'empêchent
d'envisager des idées neuves et de s'ouvrir à celles venues d'ailleurs,
d'autres cultures et d'autres pays.
—
D'un entraînement de l'esprit à développer et à parfaire en y
ré-insufflant, parce qu'elles ont été négligées, trois dimensions parmi
celles qui nous différencient du règne animal et nous définissent en tant qu'humains
:
1.
La conscience de l'éthique, ou bien (pour faire court car ce thème est trop
vaste pour le développer ici) la rigueur, l'honnêteté morale impliquant le
respect de sa propre dignité, de celle des autres, des droits de chacun — sans
oublier ceux des animaux— et de notre liberté de pensée.
2. La
conscience de l'attention aux autres, qui implique le fait de se sentir
concerné par la souffrance d'autrui et d'agir pour en éradiquer ce qui est de notre ressort; cela englobe la
solidarité, la fraternité sans lesquelles la société et la politique sont
déshumanisées.
3. La
conscience de l'attention à soi et au Monde, permettant d'éclairer notre compréhension de la relativité et de l'interdépendance de toutes choses permettant de
réaliser que le bien-être de chacun dépend de celui de tous; que toutes choses
existant dans le cosmos, du vers de terre à la galaxie, sont liées et interdépendantes; que le
moindre événement en n'importe quel point de l'univers retentit sur tout le
reste et en modifie l'information. C'est ce que les scientifiques ont appelé
l'effet papillon et ce qui fait la preuve du bienfondé de l'écologie
politique, environnementale et spirituelle.
Que
cela nous plaise ou non, nous sommes solidaires les uns des autres ainsi que de
toute la création. L'attention à soi et au Monde est ce qui nous conduit à
développer le sens de notre responsabilité universelle, c'est à dire à prendre
en compte les conséquences concrètes et morales de nos actes et à évaluer
les dangers encourus lorsque l'on ne se soucie pas de fixer des limites à la
soif d'expansion de l'ego. (L'ego? Vous savez? La voix qui parle dans notre
tête et nous bassine: "Moi, le plus important"...)
—
Quoi? Comment? Que venez-vous nous parler d'"éthique", de
"compassion", de "conscience"… c'est bien un discours de
femme! Ignorez-vous qu'en temps de Crise (Quand La Crise est dans l'air, elle
prend un grand C!) on se doit de parler Finance, Bourse, Économie, Relance des
Marchés, Abaissement des Retraites, restrictions des budgets concernant l'Éducation Nationale, la Santé,
la culture?… (Quand la culture est dans l'air elle n'a droit qu'à un petit c!)
S'il
vous plait, rengainez vos révolvers, Messieurs, ils sont impuissants contre ce
qui anime les Justes, ces gens simples "sans peur et sans reproche" devant lesquels vous devrez vous incliner,
comme nous le faisons tous. Sans doute existe-t-il d'autres méthodes pour
redresser la barre, mais je ne pense pas que l'on puisse faire l'économie de
celle-ci — un modèle d'éducation qui serait fort utile aux élèves récalcitrants
quant à l'égalité des sexes. Si nous ne nous donnons pas les moyens de le
mettre en chantier, toute nouvelle forme de modification politique ou sociale
se verra détournée ou contaminée à son tour par le virus de la corruption qui
se greffe sans peine, on ne le sait que trop, sur le cerveau des affamés de
pouvoir plus soucieux de gains que d'éthique. À l'image des cellules malsaines proliférant
dans un corps atteint de cancer, notre grand corps social humain est malade. Il
suffit pour s'en convaincre de regarder quotidiennement le journal télévisé, pour voir les dérapages quotidiens.
LA GUÉRISON OU L'EXTINCTION.
Ce
défi ultime, d'appliquer avec rigueur une écologie de l'esprit alliée à
l'écologie politique et environnementale, il nous appartient de le relever
collectivement et individuellement: que chacun balaye devant sa porte qu'elle soit extérieure ou
intérieure, et tout le monde s'en portera mieux. Le bien-être, la santé, la
survie même de notre espèce dépendent de notre intelligence de la situation
mondiale et de nos engagements, compte tenu des dégâts que nous sommes en
mesure de causer avec les armes nucléaires, les déchets atomiques, les
pesticides, et autres bombes à retardement dont nous nous sommes dotés.
Quant
à la Terre, en vérité elle en a vu d'autres, elle sait réguler son métabolisme
et ses quatre grands éléments ont la capacité, si nous dépassons les bornes,
d'éradiquer sans états d'âme notre espèce de sa surface comme la colonie de
parasites dangereux que nous serons devenus pour elle. Ne poussons pas trop
loin le bouchon.
Il
semble que de tous temps nous ayons laissé à la religion le soin de développer
la conscience de l'éthique, de la compassion et de ce que l'on doit à soi et au
Monde; mais les églises, rappelons-le, font elles aussi face à la contagion,
après tout, elles sont faites d'individus dont certains résistent, et il importe
de leur rendre hommage, mais d'autres cèdent à la corruption qui assombrit des
pans entiers de la société humaine. Il est temps que l'éducation de ces valeurs
humanistes soit prise en charge par des instances laïques et néanmoins
spirituelles. Précisons que ce dernier terme se réfère aux qualités
universelles de cœur et d'esprit qui font que, croyants ou non croyants, nous
pouvons nous prétendre humains. Où sont nos sages, nos instructeurs? Ils ont du
pain sur la planche.
QUI
FAUT-IL SOIGNER? ET COMMENT?
La
guérison de ce "cancer moral" passe donc par l'assainissement de
l'esprit des adultes et en particulier, celui des candidats à l'Écologie
Politique et celui des parents dont les comportements servent de modèle aux
jeunes générations. Pléthore de pédopsychiatres, de psychothérapeutes et
d'enseignants déplorent que leurs efforts pour aider les enfants qui posent des
problèmes chez eux ou à l'école soient peu payés de succès. Ils vous diront
qu'ils reflètent souvent les dysfonctionnements de leurs parents.
"Ce sont eux qu'il faudrait commencer par éduquer!" affirment-ils.
D'évidence, les jeunes sont chacun à leur manière un reflet de la société dans
laquelle ils ont pris naissance; ils n'appliquent guère les sentences
dont on les bassine, selon les cas, ils se calquent sur les comportements et
les opinions de leurs ainés ou bien les rejettent systématiquement, mais ils
ont parfois tendance à reproduire la violence et l'immoralité ambiantes.
Au
lieu de faire pression sur les media, nous permettons qu'ils soient intoxiqués,
tout comme nous le sommes, avec des doses massives de publicités mensongères,
faites à grands frais pour nous convaincre que le bonheur s'obtient par la
consommation et les biens matériels. Nos enfants deviennent accros à des films
violents ou bien à des jeux virtuels qui leur font perdre le sens de
la réalité quotidienne. Ils y jouent le rôle du héros pourvu d'armes et parfois
de supers pouvoirs, mis en situation de détruire tout ce qui fait obstacle au
but qui lui est assigné: être le tueur le plus performant, le gagneur, ce qui
est censé les sauver du pire: être un "looser", perdre la face et la
considération des autres. Ils courent ainsi un risque de confusion entre
réel et virtuel, et ce qui est pire, de devenir insensibles à la souffrance
infligée à autrui dont on finit par ignorer qu'il est un être sensible comme
soi.
Merci
aux marchands d'illusion dont l'unique souci est de conditionner l'esprit du
consommateur afin de grossir leurs capitaux. Merci aux multinationales
distributrices de nourritures polluées qui font de nos gamins des obèses et la
proie d'allergies innombrables.
Nous aspirons tous à vivre dans un monde en paix, dans une société plus conviviale, moins morose et à mettre un terme à l'escalade de l'exploitation outrancière des ressources de la Terre et des océans, ainsi qu'à la violence et à la corruption partout où elles sévissent. Si c'est là ce que nous voulons, le retour à une conscience saine pour les adultes et une éducation adéquate pour les enfants, qu'ils soient de souche française ou de parents immigrés, alors que ce soit l'une de nos priorité. Ces postes devraient revenir à des enseignants formés à l'écologie de l'esprit, et sélectionnés avec une exigence particulière pour ce qui concerne les qualités de cœur et l'ouverture d'esprit. Fort heureusement, il en existe déjà beaucoup en France mais ils ont le bourdon et il y a de quoi! Donnons-leur la parole. Écoutons-les. Ils sont bien placés pour savoir ce qui ne va pas à l'école, au lycée, à l'université et assez perspicaces pour pointer ce qui manque à nos enfants pour en faire des adultes équilibrés, responsables et respectueux des valeurs humaines.
Les
propositions contenues dans ce billet sont des suggestions qui peuvent être
mises en application dés maintenant, prises comme base de réflexion, enrichies,
modifiées ou simplement oubliées. Portez-vous bien et prenez soin
des autres comme de vous-même.
Lise Medini
Publié en 2010 sur le site d'Europe Écologie Les Verts
Publié en 2010 sur le site d'Europe Écologie Les Verts
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